CAZERES

CAZERES (extrait du guide Vert michelin)

La ville , ancienne étape de pèlerins et de marchands sur la route de Toulouse aux Pyrénées , tire un agrément nouveau de sa position sur le léger abrupt d’une rive concave de la Garonne, depuis qu’un barrage de l’EDF a rehaussé le niveau du fleuve (plan d’eau de CAZERES, activités nautiques).

Eglise . 14è et 15è siècle. Elle conserve dans la salle des fonds baptismaux greffée sur la chapelle oblique de la Vierge, à droite, les pièces d’un trésor remis en valeur.
Autour des fonds baptismaux (1320) à cuve décagonale - remarquer l’agneau et la croix du diocèse de RIEUX – sont présentés des bustes reliquaires ( Sainte Quitterie, Saint Jacques) ; des pièces d’orfèvrerie religieuse et des vêtements sacerdotaux, des vitrines de documents ayant trait à l’histoire locale (confréries, pèlerinages).
Vierge de l’enfant du 13è siècle et retables en bois doré et peint du 17è siècle


 


Petite histoire
De la Confrérie de Saint Jacques de CAZERES
Dite aussi Confrérie des Pèlerins ou des Sanjacaïres
Article de Robert FOCH avril 1994
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Confrérie : (du latin « Cum » : avec ; « frater » : frère )
Association soumise à, des statuts, des règlements, et qui a pour but une œuvre de piété, de charité , de dévotion. Les Confrères paient une cotisation destinée à l’entretien de la chapelle du Saint Patron et au soulagement des Confrères vieux ou malades.
(Nouveau dictionnaire universel de Maurice Lachatre – vers 1850)

Les siècles passés ont vu fleurir dsans les villes et les villages les plus humbles des associations pieuses et charitables, destinées à honorer les saints, à entretenir les édifices du culte , et à aider le prochain dans ses nécessités.

CAZERES et les villages environnants n’ont pas fait exception à cette règle jusqu’à la révolution de 1789. Si cette période de notre histoire marque de profonds changemenrts dans la structure du pays, elle ne pourra pas effacer des traditions locales profondément ancrées dans la mémoire collective et qui survivront à tous les changements politiques et même à l’évolution de l’Eglise.

Qui songerait à supprimer la procession du Vœu de 1630 à CAZERES  ? Qui songerait à interdire à la Société de Saint Vidian de Martres la reconstitution annuelle de la bataille entre les Sarrazins et les chrétiens ? Qui songerait à supprimer la fête du papogaï à RIEUX, dont les archers étaient membres de la Confrérie de Saint Sébastien ?

Le pèlerinage à COMPOSTELLE Et les Confréries de Saint Jacques

A partir du XII è siècle, le succès européen du pèlerinage à Compostelle s’affirme et s’amplifie sans cesse. Des milliers de pèlerins se mettent en marche vers l’extrémité des terres connues, vers la lointaine Galice, pour aller vénérer l’apôtre Jacques.

Si « tous les chemins mènent à ROME », on peut en dire autant pour Compostelle. La vallée de la Garonne constitue un itinéraire privilégié. De Toulouse à Saint Bertrand de Comminges, elle est parsemée d’abris pour les pèlerins et les Confréries fleurissent dans toutes les localités. Sans que la liste soit complète, on peut citer MURET, NOE, CARBONNE, LA SALVETAT entre SALLES et ST JULIEN, GENSAC, CAZERES, PALAMINY, MARTRES TOLOSANE .. et encore RIEUX, MONTESQUIEU, SAINT CHRISTAUD, SAINT MICHEL, LE PLAN.
Saint Jacques est honoré dans ces lieux : Confrérie, chapelle, statues et hôpitaux dans les villes les plus importantes.

La CONFRERIE de CAZERES.

A Cazères, la Confrèrie est fondée vraisemblablement au XIVème siècle, sans qu’on puisse fixer précisément l’année. A cette époque, elle reçoit une importante donation d’un certain VITAL SARLADE. Il lègue plusieurs maisons donnant sur la rue Capsubran (actuelle rue du 4 septembre) où la Confrérie établira son siège. Au moment de la révolution, faute d’un Hôtel de Ville assez vaste, « la maison du ci-devant Saint Jacques » servira de lieu de réunions publiques, de Temple de la raison, et d’école communale. Elle s’élevait sur l’emplacement actuellement occupé par l’immeuble Toigne et la papeterie Abadie-Boué.

L’Hôpital.

L’Hôpital Saint Jacques pour recevoir les pélerins allant ou venant de Compostelle, quant à lui, se situait à l’entrée de l’ancien cimetière, sur le jardin public actuel, et confrontait la Chapelle de Saint Jean Baptiste. Ces deux bâtiments ont disparu lors du transfert du cimetière dans les années 1830.

L’Hôpital était rudimentaire, sans doute comparable à celui du Plan, décrit en 1634 comme « une petite maison et dans icelle trois archelits avec quelques coettes et quelques linceuls ».
La confrérie y tient un hospitalier, chargé de s’occuper des pèlerins de passage, et le cas échéant y loge un confrère cazérien sans ressource. Ainsi en 1785, les Confrères délibèrent que « Laurent Dubouich confrère, et sa femme, logent à la petite chambre située au midi de l’hôpital et qu’ils y soient tenus par charité jusqu’à leur décès « .

Les revenus de la Confrérie.

Au cours des siècles, la Confrérie de Saint Jacques reçoit des legs, sous forme d’argent, de terres, de vignes. Ce qui permet à l’Evêque de RIEUX d’affirmer en 1724 qu’elle a « un revenu certain » augmenté des cotisations annuelles des Confrères.
Parmi les Bienfaiteurs, on retiendra la famille Darbas, au XVIè siècle. Riches marchands, co-seigneurs de CAZERES, on leur doit l’établissement de la Chapelle Notre Dame de la Conception (1523), le fontaine publique du Bourguet (1562), la belle croix à coquilles de Porrus au nom de Jehan Darbas, entre autres. La confrérie reçoit de cette famille une somme d’argent importante qui « placée en mains sûres », selon la formule consacrée, permettra de faire face aux dépenses diverses.

L’entretien et l’ornementation de la Chapelle de Saint Jacques.

Parmi ces dépenses, on compte l’entretien et l’ornementation de la Chapelle de Saint Jacques dans l’église paroissiale.
En 1655, la Confrérie passe commande à Antoine Fontan, maître sculpteur de Toulouse , d’un rétable avec ses colonnes, corniche, fronton et ornementations diverses , lui demande de modifier la statue de Saint Jacques ( « lui agrandir le chapeau .. »)
Deux ans auparavent, c’était Jean Lapouge, peintre et sculpteur de CAZÈRES , qui s’était engagé «  à faire travailler un reliquaire Monsieur Saint Jacques avec son pied d’estal fermant à clef, semblable à celuy de l’église Sainct Sernin de Tholoze, doré, glassé, estouffé et incarné en bon et du estat et le remettre en perfection à ladite frérie, travaillé par ses mains ou celles de son fils , Maître Doreur ».

En 1770, on fait dorer les reliquaires de la chapelle, on dépense la somme importante de 105 livres pour le pied d’argent du reliquaire de la Sainte Croix envoyé par Pierre Lamezan..
Le rétable a disparu, mais les 2 statues et le reliquaire d’argent ont traversé les siècles et font partie intégrante du patrimoine Cazérien, ainsi que le beau drap mortuaire utilisé pour les obsèques des Confrères, orné d’une magnifique broderie représentant Saint Jacques en pèlerin et portant l’inscription «  Société de Saint Jacques » . le nom de « société » avait remplacé celui de « confrérie après la révolution pour se mettre au gôut du jour, aussi bien au Plan qu’à Cazères ces sociétés dureront tant bien que mal jusqu’au début de ce siècle.
Les plus anciens Cazèriens racontaient encore en 1950 qu’avant la guerre de 14, le jour de Saint Jacques , 25 juillet , un membre de la famille Bergès Hyacinthe (actuelle boutique Pilou) arborait à la fenêtre de sa maison « la bannière des SANJACAÏRES ». Ce Bergès devait être le dernier sociétaire. Il a disparu, de même que la bannière…

L’ORGANISATION de la Confrérie et les fêtes

Sous l’ancien régime, la Confrérie, comme toutes les autres associations de ce type (Cazères en compte au moins 16 au XVIII è siècle) observe scrupuleusement des statuts, régulièrement approuvés par l’autorité ecclésiastique. Chaque année, les Confrères se réunissaient pour élire 4 prieurs ou Bayles , « Pour régir et gouverner » les affaires de la Confrérie. On nomme aussi un Syndic, des auditeurs des comptes qui approuveront ou refuseront certaines dépenses, un Hospitalier…

Chaque 25 juillet a lieu la grande fête de la Confrérie. Messe solennelle accompagnée par l’orgue et les violons, procession générale dans toute la ville. Le lendemain 26 juillet, jour de la Sainte Anne, Messe de Requiem pour tous les Confrères décédés.

A cette occasion , les Prieurs recueillent des cotisations des Confrères (81 en 1662) , organisent des enchères pour désigner le porteur de la bannière (Jean Courneuil emporte l’enchère en 1662 pour 6 livres) ,les porteurs du buste de Saint Jacques à la procession, les porteurs de bourdons…

Bien sûr, une fête est une fête.. Chaque 25 juillet aussi, les Confrères se rassemblent pour une « collation «  Collation conséquente si on en croit les comptes de l’année : «  Faisons fourniture de 36 livres 6 sols de deux veaux pour notre collation veille St Jacques, de 25 livres 4 sols pour 63 pots de vin à 8 sols le pot, 3 livres 7 sols pour l’apprétage de la viande, 28 livres pour le pain de notre collation, gâteaux et pain bénit.

Ne croyons pas cependant que les Confrères oublient leurs devoirs charitables. Dans leurs dépenses, on trouve aussi des « distributions de fèves aux pauvres à cause de grand nécessité », les frais de sépulture «  d’un pauvre pèlerin inconnu qui décéda chez Jean Pey Prades » …

Au cours des siècles, combien sont partis de chez nous pour atteindre le tombeau de l’Apôtre, combien d’étrangers sont passés et ont trouvé aide et réconfort auprès des sociétés de Saint Jacques ? on ne le saura jamais précisément… D’où venait ce pauvre pèlerin inconnu ?

Qu’advint –t-il d’un couple de Bruxellois en route vers Compostelle en 1740 : une fille leur naît à CAZERES ? d’autres partent et reviennent vite en bonne santé : François Lafore , de Palaminy par exemple. Le jour de la Saint Jacques 1715 , il fait son testament, étant sur le point de partir à Compostelle. Le 28 octobre, il passe contrat de mariage à la métairie de Barbe avec Marie Abribat. Le 10 octobre 1723, Pierre Laveran, Jean Laveran, Bernard Bagnères et Nicolas Abadie arrivent à Carbonne : ils en étaient partis le 11 aôut «  pour accomplir le vœu qu’ils avaient fait «  deux mois et plus de 2000 kilomètres …

Et si on reconstituait la société Saint Jacques ?

Et quelques détails locaux :
A CAZERES en 1528, les Confrères de Saint Jacques sont 99, parmi lesquels des habitants de Palaminy, Mauran, Gensac, Mondavezan, Plagne, Lavelanet, Marquefave, Saint Cizy,…

A Palaminy, c’est à cette époque que la Confrérie s’adresse à l’Evêque de Rieux pour obtenir confirmation de ses statuts . c’est une magnifique page d’occitan classique :

«  A Vos Monsenhor, Monsenhor de Rius, supplican humblement le Priur et Confrays de la Confrayria fundado en l’honor de Monsenhor Sainct Jammes au loc de Palamenic, que vos plasia de vostra benigna gracia confirma et autorisa los articles et estatutz de la dita confrayria , et dona et concedi los perdons afin que lo divin offici sia augmentat, et vos faretz bien et ouvra pia, et los ditz confrays seran tenguts de prega Diou a jamès per lo vostre noble estamen «  (Préambule)

Robert FOCH avril 1994


 

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