Au pied du col de Roncevaux
L'agglomération antique d'IMUS PYRENAEUS à St-Jean-le-Vieux (Pyrénées-Atlantiques)
A St-Jean-le-Vieux, sur le passage de la voie romaine de Bordeaux à Astorga, dans sa
traversée des Pyrénées par les " ports de Cize " : cols de Lepoeder et d'Ibaneta-Roncevaux, a été
repérée en 1965 une agglomération secondaire antique qui paraît avoir fixé la population dès le
dernier quart du 1er siècle avant J.C. et peut-être, sans solution de continuité, jusqu'au moyen âge.
On a tout lieu de penser que c'est le nom de cette agglomération, IMUS PYRENAEUS qui
nous est transmis par l'Itinéraire d'Antonin (IIIème siècle).
Il ne paraît pas invraisemblable, même si la physionomie primitive du " camp romain ", tel
qu'il apparaît aujourd'hui, a pu être modifiée par l'occupation médiévale, que la fondation de ce
village antique ait correspondu à la conquête militaire et à la sûreté d'un passage pyrénéen
important, au moment où les campagnes coordonnées de Valerius Messala Corvinus contre les
Aquitains (27-26 avant J.C.) et d'Auguste contre les Astures et les Cantabres (25 avt), fixent la
frontière, que marque désormais, au dessus de St-Jean-le-Vieux, le trophée-tour d'Urkulu et
permettent d'entamer dans le secteur, dès sa pacification, une exploitation minière extensive
(cuivre, fer, argent, plomb).
En tout cas, l'important mobilier archéologique découvert durant 9 campagnes de fouille
programmées (1966-1975), montre, à défaut encore d'indices déterminants sur une occupation
militaire, une réelle prospérité correspondant aux dernières années du règne d'Auguste et à ceux de
Tibère et de Claude.
Ainsi, l'étude de l'abondante céramique sigillée, tant italique que sud gallique (Montans) a
montré que le négoce de cette céramique de luxe devait disposer à St-Jean-le-Vieux, dès 20, d'un
relais, pour ses exportations vers l'Espagne du nord-ouest et du centre (T. Martin, J.L.
Tobie, les
débuts de la romanisation du site de St-Jean-le-Vieux -IMUS PYRENAEUS-, à travers l'étude des
céramiques sigillées italiques et sud gauloises, Aquitania XVII, 2000, p.83 à 119).
Par contre, à partir de l'époque flavienne, les produits céramiques espagnols, dont
l'exportation est favorisée par la politique douanière de cette dynastie, relaient complètement à St-
Jean-le-Vieux la vaisselle italique et gauloise, le site s'approvisionnant au plus près, comme le ferait
une agglomération d'Espagne. Cette observation est confirmé par l'étude des monaies du 1er siècle
qui y sont relevées.
Les vestiges de l'architecture ancienne, mis au jour ou repérés sur deux secteurs
principaux :
- sous l'actuel village
- dans l'emprise du " camp romain "
(le troisième au nord du village, n'a révélé récemment à l'INRAP, que très peu de traces
d'occupation antique), indiquent clairement deux phases dans l'histoire de l'habitat et deux
nécropoles de la fin de l'antiquité et du haut moyen âge.
L'orientation régulière des bâtiments de l'état le plus ancien (fin 1er siècle avt J.C. début
IIème après J.C.) respecte exactement celle de l'actuel " camp romain '' et de ses défenses
conservées au sud et à l'ouest.
A l'intérieur du camp, aucune fouille raisonnée n'ayant pu encore se développer, les
fouilles, limitées, ont révélé un plan orienté et contraint (le sondage " Pommier " a montré la quasi
exacte superposition des trois états d'une même maison), marqué de ruelles de galets.
Les fouilles profondes montrent la présence de nombreux trous de poteaux avec pierres de
calage(le plan d'un seule construction de ce type a été complètement repéré, elle paraît déjà
respecter la même orientation).
C'est à cette première agglomération du " camp " qu'il faut rattacher le bâtiment thermal
entièrement fouillé entre 1970 et 1975 et désormais présenté au public.
Deux états successifs se montrent clairement. On édifie d'abord une file de 4 salles
puissantes : praefurnium, bain chaud et labrun dans une petite abside, vestiaire.
Ces premiers thermes, construits à la fin de la période augustéenne, sont réutilisés
dans le cadre d'un agrandissement, vers 30, par adjonction d'un vaste caldarium à deux absides
(réservé aux hommes) et d'une piscine froide. Ce balnéaire abandonné à la fin du 1er siècle, est
aujourd'hui reconnu comme le plus anciennement daté de l'actuel " grand Sud-ouest ". Son plan
doit beaucoup à l'influence espagnole (cfle plan augustéen des thermes de Conimbriga au Portugal
voir A. Bouet, J.L. Tobie. Les thermes d'Imus Pyrenaeus -St-Jean le Vieux-, Pyrénées Atlantiques,
Aquitania, XIX, 2003 pp 155-179).
L'on ne rattache jusqu'ici à aucun événement historique repéré la désertion du " camp
romain ". à partir de la fin du 1er siècle et l'édification sur un nouvel axe Est/ouest (l'axe du village
actuel), d'un second état encore occupé au début du V siècle. Il a été sporadiquement reconnu au
Nord du " camp romain " (grands bâtiments, four de potier) et sous le village actuel (maison à
abside postérieure à 180, propriété Berha).
La reconnaissance au nord du camp romain de fosses, liées à de petites constructions
cirulaires auprès d'une possible chapelle primitive, tout comme les cuves du cimetière de
Laco, qui ont été fouillées, pourraient indiquer le maintien ici d'une population durant l'antiquité
tardive et le haut moven-âge.